Les "réseaux sociaux" comme systèmes de pouvoir et de profit

 

Le terme « social », qualifiant les réseaux présents sur le web est trompeur. Il s’agit de systèmes informatiques mis en place par des entreprises à but lucratif, donnant la possibilité, à ceux qui s’y abonnent, de déposer ou voir des contenus et d'échanger des messages. Comme nous sommes sur Philosophie, Science et Société, site universitaire libre et indépendant, nous parlerons d’abord du réseau nommé Academia.edu.

Ce réseau de diffusion par le web appartient à l'entreprise Academia dont le siège est à San Francisco. Le site a un nom de domaine en « .edu », terme trompeur, car ce n'est pas une institution éducative et a un intitulé "Academia" qui évoque l'Université alors qu'il y est étranger (il vise et utilise les universitaires). L’utilisateur, pour participer, doit accorder une licence mondiale, irrévocable et sans dédommagement à Academia pour utiliser, copier, adapter, vendre, diffuser, utiliser à des fins publicitaires tout ce qu’il met sur son profil et tout ce qui est recueilli par les traces de connexions. Rien que ça ! 

Je cite :

« Subject to your compliance with the terms and conditions of these Terms, Academia.edu authorizes you to download, view and print any Academia.edu Content, solely for your personal and non-commercial purposes, and to access and use the Site and Services, including to download, view and print any Member Content solely for your personal and non-commercial purposes, and subject to the restrictions set forth in these Terms. You have no right to sublicense the license rights granted in this section.

You will not use, copy, adapt, modify, prepare derivative works based upon, distribute, license, sell, transfer, publicly display, publicly perform, transmit, stream, broadcast or otherwise exploit the Site, Services or Collective Content, except as expressly permitted in these Terms. No licenses or rights are granted to you by implication or otherwise under any intellectual property rights owned or controlled by Academia.edu or its licensors, except for the licenses and rights expressly granted in these Terms ».

L’entreprise monnaye les informations qu'elle recueille. Mais pas seulement ! Academia.edu a prévu, selon son PDG Richard Price, de générer des profits en vendant aux entreprises les tendances à suivre en recherche et développement, tendances dégagées grâce à l’analyse des données stockées dans Academia.edu (Source : Scientic American : « Interview with Richard Price, Academia.edu CEO » ) https://blogs.scientificamerican.com/information-culture/interview-with-richard-price-academia-edu-ceo/

Passons maintenant à Facebook. Facebook est le plus gros réseau populaire existant en 2017. Il fonctionne selon le même principe. Le système utilise le profil et les traces de connexions pour les monnayer. De plus, la licence donne la propriété des contenus à Facebook.

Je cite :

« Conformément à vos paramètres de confidentialité et des applications : vous nous accordez une licence non exclusive, transférable, sous-licenciable, sans redevance et mondiale pour l’utilisation des contenus de propriété intellectuelle que vous publiez sur Facebook ou en relation avec Facebook (licence de propriété intellectuelle) ».

L’entreprise Facebook a déclaré 1,86 milliard d’utilisateurs actifs mensuels en 2016. Ses résultats financiers sont les suivants : Chiffre d’affaires annuel, 27,64 milliards de dollars et bénéfice annuel, 10,2 milliards de dollars pour 2016.

Dans ces prétendus « réseaux sociaux », que se passe-t-il ? En contrepartie du moyen technique d'échange qui est prêté, l'usager génère des contenus et des services gratuitement. Est-ce un marché équitable ? Bien sûr que non. L’avantage tiré de la communication avec ses correspondants qui bénéficie à l’usager est sans commune mesure avec la puissance socio-économique conférée aux propriétaires du système.

L’utilisateur moyen est généralement enfermé dans un cercle clos d’amis, ou de relations, ou de suiveurs (selon la plateforme utilisée), qui ne dépasse pas quelques centaines de personnes. Il ne touche pas un sous et dépense beaucoup de temps à nourrir le système, tout en subissant la publicité ciblée qui lui est adressée. Seuls quelques gros médias, artistes de renom, ou partis politiques, et aussi les « usines à trolls »*, arrivent à tirer partie du système, en ayant une masse d’abonnés et un nombre d'interventions conséquents, mais c'est au prix de nombreuses heures de travail pour entretenir la clientèle.

* Officines spécialisées dans la désinformation utilisant des employés humains, mais surtout des robots intervenant de manière automatique dans les "réseaux sociaux" pour manipuler l'opinion.